• Le hasard

    Le hasard

     

     "Les hommes supposent communément que toutes les choses de la nature agissent, comme eux-mêmes, en vue d’une fin… Si par exemple une pierre est tombée d’un toit sur la tête de quelqu’un et l’a tué, voici la manière dont ils démontreront que la pierre est tombée pour tuer cet homme. Si elle n’est pas tombée à cette fin , par la volonté de Dieu, comment tant de circonstances ont-elles pu se trouver par chance réunies? Peut-être répondez-vous que cela est arrivé parce que le vent soufflait par là et que l’homme passait par là. Mais, insisteront-ils, pourquoi le vent a-t-il soufflé à ce moment? Pourquoi l’homme passait-il par là à ce même moment? Si vous répondez encore: le vent s’est levé parce que la mer, le jour avant, avait commencé à s’agiter, l’homme avait été invité par un ami, alors ils insisteront encore, car ils n’en finissent pas de questionner: pourquoi donc la mer était-elle agitée? Pourquoi l’homme a t-il été invité à ce moment? Et ils continueront ainsi de vous interroger sans relâche, sur les causes, jusqu’à ce que vous vous soyez réfugiés dans la volonté de Dieu, cet asile d’ignorance". (Spinoza)

    De manière générale, on est spontanément méfiant envers ce qui n'a pas d'explication, envers ce qui échappe à toute connaissance quant à ce qui en est la cause. De fait, lorsque le comment échappe à l'investigation, on a tendance à se réfugier dans le pourquoi. Le pourquoi, en vue de quoi, de quelle finalité, mais aussi le pourquoi, au sens de savoir quelle est la cause qui a déterminé ce qui est, comme on le voit bien dans l'exemple de Spinoza. Lorsqu'on n'en trouve pas, on se réfugie dans la finalité. Ce qui est apparu a nécessairement un sens, sinon pourquoi cela serait-il ? Mais pour l'instant, on ne le connait pas, ce qui cause de la frustration.

    Le scientisme, mouvement apparu au XIXe siècle, postule qu'il n'y a pas de phénomène sans cause. Les causes et les conséquences s'emboitent, de sorte qui rien n'est sans cause et donc rien n'est sans explication. Eliminer de la sorte le hasard signifie que tout serait prévisible, mais nous savons que ce ne sera jamais le cas. Ni l'être humain, ni le monde ne sont des machines réglées comme des horloges. Il restera toujours une part de hasard et donc l'irritante  présence de l'asile d'ignorance continuera d'imposer sa lourde insignifiance à notre esprit. Tout ce qui est ne résulte pas exclusivement de mécanismes et donc il faut accepter que se produise des phénomènes aléatoires (relevant du seul hasard). A tout le moins, quand le phénomène n'est pas totalement prédictible, on cherche à s'en remettre à des calculs de probabilité, en se fondant notamment sur des statistiques, ce qui revient à accepter l'existence du hasard.

    On parle aussi de hasard lorsque 2 ou plusieurs séries causales indépendantes, produisent un effet inattendu (le passant, qui ne faisait qu'aller vers une destination, qui reçoit une tuile sur la tête, qui est tombée précisément à ce moment-là car une série de causes l'a fait se détacher du toit à tel moment et non à un autre); on parle aussi d'effet papillon (une cause minime rejoignant fortuitement d'autres causes minimes donne des effets considérables et tout-à-fait inattendus). Le piéton qui voit l'affiche d'un journal et qui, sans qu'il n'en avait l'intention en sortant de chez lui, décide d'acheter le journal en question. Il prend, à la suite d'un autre client, un billet de loto...qui va s'avérer gagnant.

    On voit d'une part que tout n'est pas qu'affaire de déterminisme et d'autre part que le résultat, parfois surprenant, ne dépend d'aucune intention initiale. L'imprévu existe et c'est ce que l'on nomme hasard.

    Jean-Luc

     


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